Discours
Monsieur Benoît Odelot, Directeur de l’Office nationale des Combattants et Victimes de guerre représentant de Monsieur le Préfet
Colonel Van Damme, représentant le Général gouverneur militaire de Lille,
Madame Sophie Bleuet, Directrice interrégionale des services pénitentiaires de Lille,
Mesdames, Messieurs les élus du Conseil Municipal,
Mesdames, Messieurs les présidents et membres des associations de mémoire et les anciens combattants,
Mesdames, Messieurs les porte-drapeaux,
Mesdames, Messieurs les musiciens de notre batterie fanfare,
Mesdames, Messieurs les sapeurs-pompiers,
Chers jeunes du Conseil de la Jeunesse Loossoise,
Chers enfants du Conseil municipal des Enfants,
Chers enfants de la Chorale,
Chers parents qui les accompagnez ce matin,
Mesdames, Messieurs,
Chers Loossois, Chères Loossoises et amis venus d’ailleurs
Aujourd’hui, nous nous réunissons pour rendre hommage non seulement à un édifice exceptionnel mais aux héros, aux hommes qui ont sacrifié leur vie pour la liberté et la paix.
La Première Guerre mondiale fut une épreuve partagée par toute la Nation, épreuve qui n’épargna aucune famille, aucune commune. La blessure de cette guerre est à jamais inscrite dans l’histoire de notre pays car la France y a perdu un million quatre cent mille hommes. C’est cette perte irréparable de toute une génération sacrifiée qui est à l’origine de la construction des monuments aux morts avec un but précis : rassembler la population autour du souvenir de ceux qui ne reviendront plus et donner un peu de gloire à ceux qui se sont sacrifiés pour la victoire.
Le souvenir de notre passé vit donc pleinement dans chacune de nos villes. Nous le ressentons avec davantage de force devant nos monuments aux morts. Ils sont un pan de notre mémoire. Ils sont les témoins des sacrifices passés. Ils sont des marques ineffaçables de la reconnaissance nationale. Ils sont des lieux de rassemblement.
Avec un objectif : transmettre la mémoire et les valeurs qui nous unissent.
Il y a 100 ans, le 29 mars 1925, ce monument a été inauguré pour immortaliser leur mémoire, pour rappeler à chacun et chacune d’entre nous le prix de la paix et de la liberté que nous avons la chance de vivre aujourd’hui.
Un siècle s’est écoulé depuis que ce lieu est devenu un symbole et pourtant les échos des sacrifices d’hier résonnent profondément dans nos cœurs. Comment oublier cette tragédie alors que non loin des frontières de l’Europe, le grondement sourd des bombardements est perceptible. Ce qui nous rappelle malheureusement que la Paix demeure bien fragile.
C’est contre l’oubli aujourd’hui que nous devons nous battre, l’oubli des vies brisées, de ces jeunes sacrifiés partis à l’âge où nos enfants fréquentent encore l’école, l’oubli de ces familles endeuillées, de ces orphelins…
En cet instant nous honorons non seulement la mémoire de ces soldats tombés : hommes, pères, fils, frères parfois issus d’une même famille mais aussi l’héritage qu’ils nous ont laissé : celui de l’espoir d’un avenir plus juste et plus pacifique.
Ce monument n’est pas un simple édifice. Il est le témoin silencieux d’une résilience collective, de la capacité de notre nation à se relever et à se reconstruire après les pires épreuves.
En 1919, la législation française inscrit dans ses textes une « Loi sur la commémoration et la Glorification des morts pour la France » octroyant aux communes des subventions pour permettre la construction de monuments aux morts. La ville de Loos, comme beaucoup d’autres communes était concernée et a décidé en 1921 d’élever un édifice symbolisant sa reconnaissance à ses soldats disparus au sein du cimetière Leclerc. La subvention de l’Etat, la contribution de la ville et la souscription publique en ont permis la construction.
Sous son allure simple avec un obélisque qui culminait à 4,05 mètres se découvre une architecture souterraine unique. Fidèle et Maurice Lhermitte ainsi qu’Alexandre Walare en sont les architectes.
A l’intérieur, nous découvrons les alvéoles où sont inhumés 118 soldats, un écrin éternel individualisé par une mosaïque finement dessinée où chacun d’entre eux sans distinction de grade ou hiérarchie a trouvé le repos. Sur le pilier central de soutènement sont gravés les noms des soldats loossois morts pour la France. En tout, 361 soldats décédés pour la ville… Les mosaïques ont été réalisées par Jean GAUDIN. Elles en font un monument très particulier et exceptionnel.
Je ne puis tous les citer mais je vous invite, pour cela, à participer comme chaque année, à la veillée du 11 novembre au cours de laquelle la ville de Loos énumère les noms de nos concitoyens morts sur les différents champs d’honneur et notamment lors de la Grande Guerre.
Je vous invite, dès lors, à nous accompagner au vernissage qui suit cette cérémonie pour découvrir les portraits de ces valeureux soldats dont le service Archives de la ville a pu retrouver la trace. Pour l’heure, je vais reprendre quelques noms :
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APOLLINAIRE Alphonse, père de 3 enfants adoptés par la Nation à la mort de leur père en 1916, à l’âge de 28 ans.
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DESCAMPS Jean, père de 4 enfants décédé de ses blessures à 40 ans
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MEERSSEMAN Gaston, incorporé à 19 ans et mort à 20 ans
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THIRION Fernand et Germain FERRON, deux victimes civiles, gardiens à la maison d’arrêt de Loos, exécutés par les allemands en 1918, dont une rue de Loos porte leurs noms
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CRÉTEUR Emile et Alexandre, frères jumeaux, décédés à 33 ans et 21 ans. La famille Créteur a eu ses 4 fils incorporés dont deux ne sont pas revenus vivants de la guerre
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REYNAERT Maurice et Charles, oncle et neveu ont été tués à 22 ans
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BERNARD Fernand, sixième enfant d’une fratrie, dont les 5 enfants furent mobilisés, il décéda à l’âge de 35 ans
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VANDEMOORTEL Vincent mort à 20 ans à Nouvion-Vingré (Aisne) soldat 2ème classe au régiment d’infanterie
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FAVIER César incorporé au régiment d’infanterie en 1914, il prit part à de nombreux combats, Charleroi, Saint-Quentin, La Marne, Verdun et Aisne. Il mourut en 1916, à l’âge de 30 ans.
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LECORNE Emile dont on ne connait que la description physique de son matricule militaire.
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VANDERVANNET Auguste, brigadier dans le 27ème régiment d’artillerie. Il était mobilisé sur Saint Omer. Il combattit à Dinant et Reims, où il mourut à l’âge de 21 ans.
Pour ces quatre derniers soldats, nous avons le plaisir ce jour de recevoir les membres descendants de leur famille que je salue chaleureusement.
La liste est encore longue… Ces quelques profils témoignent d’un engagement très jeune, de père, d’oncle parfois issus d’une même famille. Les ravages ne se limitent pas aux pertes humaines, des femmes ont perdu leurs enfants, leurs maris, des enfants n’ont jamais connu leur père… rien ne pourra jamais réparer un tel désastre.
Je vous invite à descendre à l’intérieur de la Crypte. Pour préserver ce lieu de recueillement, de transmission de l’histoire, la commune de Loos a entrepris un état des lieux du monument afin d’effectuer les travaux nécessaires à la préservation de cet édifice. Il est indispensable de mettre en œuvre tout ce qui est en notre pouvoir pour conserver cet hommage vivant. Il est un lieu de rassemblement lors des cérémonies patriotiques, de recueillement, et de souvenirs.
La mémoire est un sujet du XXIème siècle. Elle n’est pas le sujet réservé des historiens. Elle est d’une actualité vibrante. Nous en sommes tous les héritiers. La mémoire n’est pas un devoir. Elle est une responsabilité. Elle nécessite un véritable travail de transmission et d’explication.
Ce mémorial, inscrit au titre des monuments historiques depuis le 31 mars 2022, nous invite à la reconnaissance et à l’espérance.
Comme le disait très justement Simone Veil : « Je n’aime pas l’expression : devoir de mémoire ». En ce domaine, la notion d’obligation n’a pas sa place. Autre chose est le devoir d’enseigner, de transmettre. Là, oui il y a un devoir ».
Grace aux associations de mémoire, et aux jeunes générations nous poursuivons ce combat pour préserver les valeurs d’humanité et de dignité, pour que nos enfants grandissent dans un monde plus tolérant où les erreurs du passé ne se répètent pas. C’est dans un esprit collectif de transmission auprès de nos jeunes générations, par le biais des écoles, des cérémonies patriotiques que nous réussirons à faire vivre l’Histoire et ses leçons.
La présence, ce matin, du Conseil municipal des Enfants et du Conseil de la Jeunesse Loossoise marque la continuité et je remercie chaleureusement nos jeunes du témoignage de leur intérêt et de la confection de mosaïques à l’instar des mosaïques qui décorent notre Crypte dont vous pourrez découvrir une partie ici présente et la seconde partie à la Ferme d’Ennequin. Votre participation, à vous les jeunes, est, bien évidemment, plus qu’un symbole ; c’est un acte d’éducation, un engagement citoyen.
Je remercie, de même, chaleureusement les enseignants qui ont permis à leurs classes de participer aux visites de la crypte, organisées par le service Archives de la commune. Ils ont été nombreux, ce qui est, à mon sens un gage de leur intérêt et l’espoir de la continuité de la démarche. Le travail minutieux de recherche de notre archiviste, Mme Laetitia DESFOSSES a permis de mettre un visage, parfois un peu de connaissances sur la vie de chacun des soldats. Je vous invite, d’ailleurs, à prendre attache avec le service Archives de la ville pour participer à une visite approfondie de la crypte.
C’est à vous chers enfants, que nos poilus pensaient aux heures tragiques avec la volonté de vous délivrer de la guerre… La jeunesse d’aujourd’hui qui porte notre mémoire de demain.
En ce centenaire, renouvelons notre engagement à protéger la paix, à défendre les droits de l’homme, et à travailler ensemble pour un avenir meilleur, dans une société moins troublée.
Transmettons cet évènement pour ne pas le revivre.
En préservant un monument, on écrit l’Histoire future mais tragique !
Vive la République !
Vive la France !
Merci